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Nouvelles techniques de lecture des frottis cervico-utérins de dépistage

Henri SEVESTRE


Les principaux progrès en cytologie depuis 20 ans ont concerné le frottis de dépistage du cancer du col utérin, dont la technique n’avait pas changé depuis les années 1940 : abandon de la classification de Papanicolaou au profit du système de Bethesda, recueil en milieu liquide, automatisation de la préparation des étalements, test HPV sur le matériel résiduel, immunomarquage sur lame, et lecture assistée par ordinateur ont ainsi été mis au point progressivement.

L’importance du marché économique (30 millions de frottis annuels aux USA, 6 millions, soit un mouvement de 100 millions d’euros, en France)  justifie cet enthousiasme pour une méthode centenaire, rare exemple de longévité en médecine.
Il n’est pas déraisonnable de penser que le désir d’examiner par une méthode de lecture assistée par ordinateur ait engendré pour des raisons d’efficacité le recueil en milieu liquide et la standardisation de l’étalement sur lame, en même temps que les experts redéfinissaient les termes des comptes-rendus.

Les nouveautés apparaissent dans trois champs différents :
-améliorer la sensibilité de la détection des anomalies cytologiques après coloration de routine par l’apport de l’analyse d’image numérique (lecture assistée par ordinateur) ;
-améliorer la sensibilité de détection des anomalies pré-cancéreuses ou cancéreuses par l’identification de marqueurs spécifiques, uniques ou combinés (P16 et Ki67, ProEx, HPV Inform, …) ;
-utiliser les ressources de l’imagerie pour modifier le paradigme de lecture du frottis.

La lecture assistée par ordinateur demande une chaîne de production standardisée (recueil cellulaire, fixation, étalement, coloration) et un automate de lecture. Deux systèmes sont commercialisés à grande échelle par Hologic et Becton Dickinson. Les résultats de leur analyse sont différents :
-Hologic soumet à l’examinateur pour chaque frottis les 22 champs microscopiques contenant les cellules aux noyaux les plus anormaux, ainsi que des amas de cellules endocervicales (zone de jonction) ; le cytologiste doit donc examiner toutes les lames analysées.
-Becton Dickinson classe la probabilité de trouver une anomalie ; 20% des lames sont typiquement classées comme « normales », dont l’examen n’apportera rien.
Ces technologies ont un coût mais leur application à grande échelle augmente le bénéfice des pathologistes. Elles sont très utilisées aux USA (34% des frottis en 2010, enquête du Collège Américain des Pathologistes), mais les structures françaises, en dehors de rares centres, sont trop fragiles et conservatrices pour les utiliser.
La lecture assistée n’a pas apportée d’amélioration majeure de la sensibilité et spécificité du frottis cervico-utérin d’après la littérature. Elle apporte par contre une grande sécurité et confort à la lecture.

La recherche de marqueurs spécifiques et plus encore leur utilisation ont  été freinées par l’exigence de maîtrise des coûts des assurances sociales. Il a par exemple été très longtemps interdit en France de compléter le frottis de dépistage par une technique d’immunocytochimie. Différentes approches ont été proposées :
-détection immunocytochimique : marqueurs de prolifération (Ki67), de protéine P16 (abondamment exprimée parles cellules des lésions de haut grade), combinaison des deux marqueurs (CINTec+), de protéines de réparation chromosomiques (ProEx), de protéines d’engagement dans le cycle cellulaire ; la technique CinTec+ est d’ailleurs adaptée à une lecture assistée.
-hybridation in situ : intégration nucléaire du virus HPV (sensibilité moyenne et coût élevé par manque de diffusion limitent son utilisation).
Le couplage Ki67-P16 proposé par Roche (CinTec+) a permis d’après la littérature d’augmenter sensibilité et spécificité du frottis.

Un prototype a été testé d’examen des cellules en suspension, sans ouvrir le flacon, par une technique d’holographie couplée à une reconstruction tridimensionnelle, portant un regard neuf sur la morphologie cellulaire. La spectrométrie de masse commence aussi à s’appliquer à l’analyse morphologique couplée à la composition biochimique. Il s’agit là de voies d’exploration dont le débouché n’est pas assuré.

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