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Innovations en Pathologie Cervicale : nouveaux outils du suivi-post thérapeutique

Jean LEVEQUE


La problématique du suivi d'un CIN traité est la récidive précoce (moins de 2 ans en sachant que n'existe aucun consensus) en relation avec la persistance de lésions de CIN ou d'un hr-HPV, et tardive liée à l'existence d'un hr-HPV résiduel ou acquis par ré-infections en relation avec le mode de vie et des facteurs de risque, et au terrain (facteurs immunologiques et génétiques) qui vont concourir au développement de lésions graves (le risque de cancer du col utérin est multiplié par 6 chez une femme ayant un antécédent de pathologie cervicale traitée) [1].

 

Le suivi à 2 ans devrait inclure le test HPV

La méta-analyse de M. Arbyn confirme en 2012 la supériorité de test HPV sur la cytologie pour le dépistage des lésions récidivantes avec une sensibilité relative (Sn Re) de 1.25 [1.15-1.36] sans perte de spécificité (Sp Re = 0.97 [0.93-1.02]) [2]. Une deuxième méta-analyse publiée en 2012 confirme ces résultats et analyse les résultats du co-testing (cytologie et virologie) : le test HPV augmente la sensibilité (Sn Re = 1.15 [1.06-1.25] sans altérer la spécificité (Sp Re = 0.95 [0.88-1.02], tandis que le co-testing (cytologie plus virologie) entraîne 10% d'explorations complémentaires inutiles par diminution de la spécificité [3]. Nous retrouvons ces données dans une étude de cohorte danoise portant sur 667 patientes ayant subi une conisation pour lésions de CIN HG contrôlées entre 3 et 6 mois (20.4 % de patientes HPV pos et 17.2 % de cytologie ASC-US +) dont 3.6 % feront une récidive : la virologie est plus sensible que la cytologie (Sn HPV = 95.2 [76.2-99.9] vs Sn Cyto = 81.0 [58.1-94.6], tandis que le co-testing offre la même sensibilité que le test HPV seul au prix d'une chute drastique de la spécificité [4].
Le test est habituellement pratiqué entre 3 et 6 mois, mais une publication catalane (pour l'instant unique) a montré des résultats comparables en termes de dépistage de lésions CIN2+ à 24 mois entre la pratique du test HPV à 6 mois et en per-opératoire une fois la conisation effectuée [5].
Enfin, deux publications ont comparé le test HPV basé sur le DNA viral et le test de détection des mRNA E6 et E7 en se basant sur la sur-expression de E6 et E7 tardive dans les lésions de CIN ayant moins de chances de régression spontanée : le test DNA est plus sensible tandis que le test mRNA est plus spécifique (avec donc moins de faux positifs comme on pouvait s'y attendre) [6, 7].

 

Le suivi à long terme

L'étude cas (189 récidives)-témoins (378 sans récidives) portant sur CIN 2/3 suivis 14.6 ans de Strander a montré qu'un test HPV négatif assurait une protection d'environ 6 ans après conisation : toutefois dans cette même étude, les cancers du col invasifs survenaient 8 ans après la conisation [8].
Une étude de cohorte américaine portant sur 435 patientes conisées pour CIN2/3 entre 1988 et 2004 et suivies jusqu'en décembre 2009 par cytologie à 6, 12 et 24 mois et co-testing à 6 et 24 mois (risque de CIN2+ à 5 ans de 16.5 % et à 10 ans de 18.3 %) a montré à 10 ans avantage pour le co-testing : en effet, les patientes avec 3 cytologies négatives avaient un risque de CIN2+ à 10 ans de 9.2 % contre 3.6 % en cas de 2 co-tests négatifs [9]. L'étude du devenir à long terme des patientes de la cohorte danoise a permis de confirmer l'absence d'intérêt du co-testing viro-cytologique par rapport au test virologique pratiqué seul parmi les 477 patientes ayant un test viral négatif à 6 mois, mais surtout a corroboré les conclusions de Strander : après 6 à 7 ans de suivi, les patientes conisées initialement HPV neg présentaient un sur-risque de CIN2+ (5.7 % de risque absolu à 10 ans) supérieur à celui observé dans la population danoise de patientes HPV neg (2.7 % de risque absolu à 10 ans).
La principale difficulté du suivi à long terme est le manque de compliance des patientes qui se lassent : en population au Danemark, chez 45,984 patientes conisées (aux 2/3 pour des lésions de CIN HG), si 90 % des patientes ont un suivi adapté à 15 mois, le taux chute régulièrement pour n'être que 10 % des patientes danoises (…) à 10 ans [10]. Les auteurs retiennent comme facteurs favorisant un bon suivi, un âge croissant, une gravité croissante de la lésion initialement traitée, et le niveau socio-économique élevé.

 

Conclusions

Le test HPV doit être intégré au suivi post-conisation idéalement associé au frottis selon les recommandations françaises de 2008 car il permet de sélectionner un groupe de patientes à haut risque justifiant d'une surveillance renforcée (colposcopique en particulier) [11]. Le suivi à long terme doit être prolongé au-delà de 25 ans en sachant qu'un test virologique négatif n'écarte le risque de récidive que sur une période de moins de 6 ans après la conisation. De nouvelles recommandations françaises portant sur le suivi post-thérapeutique des lésions de CIN HG traitées sont attendues des autorités de santé françaises en 2016/ 2017.

 

Reférences

[1] Rositch AF, Soeters HM, Offutt-Powell TN, Wheeler BS, Taylor SM, Smith JS. The incidence of human papillomavirus infection following treatment for cervical neoplasia: a systematic review. Gynecol Oncol. 2014;132:767-79.
[2] Arbyn M, Ronco G, Anttila A, Meijer CJ, Poljak M, Ogilvie G, et al. Evidence regarding human papillomavirus testing in secondary prevention of cervical cancer. Vaccine. 2012;30 Suppl 5:F88-99.
[3] Kocken M, Uijterwaal MH, de Vries AL, Berkhof J, Ket JC, Helmerhorst TJ, et al. High-risk human papillomavirus testing versus cytology in predicting post-treatment disease in women treated for high-grade cervical disease: a systematic review and meta-analysis. Gynecol Oncol. 2012;125:500-7.
[4] Gosvig CF, Huusom LD, Deltour I, Andersen KK, Duun-Henriksen AK, Madsen EM, et al. Role of human papillomavirus testing and cytology in follow-up after conization. Acta Obstet Gynecol Scand. 2015;94:405-11.
[5] Torne A, Fuste P, Rodriguez-Carunchio L, Alonso I, del Pino M, Nonell R, et al. Intraoperative post-conisation human papillomavirus testing for early detection of treatment failure in patients with cervical intraepithelial neoplasia: a pilot study. BJOG. 2013;120:392-9.
[6] Persson M, Brismar Wendel S, Ljungblad L, Johansson B, Weiderpass E, S. A. High-risk human papillomavirus E6/E7 mRNA and L1 DNA as markers of residual/recurrent cervical intraepithelial neoplasia. Oncol Report. 2012;28:346-52.
[7] Zappacosta R, Ianieri MM, Tinelli A, Gustapane S, D'Angelo C, Gatta DM, et al. Detection of residual/recurrent cervical disease after successful LEEP conization: the possible role of mRNA-HPV test. Curr Pharm Des. 2013;19:1450-7.
[8] Strander B, Ryd W, Wallin KL, Warleby B, Zheng B, Milsom I, et al. Does HPV-status 6-12 months after treatment of high grade dysplasia in the uterine cervix predict long term recurrence? Eur J Cancer. 2007;43:1849-55.
[9] Kocken M, Helmerhorst TJ, Berkhof J, Louwers JA, Nobbenhuis MA, Bais AG, et al. Risk of recurrent high-grade cervical intraepithelial neoplasia after successful treatment: a long-term multi-cohort study. Lancet Oncol. 2011;12:441-50.
[10] Barken SS, Lynge E, Andersen ES, Rebolj M. Long-term adherence to follow-up after treatment of cervical intraepithelial neoplasia: nationwide population-based study. Acta Obstet Gynecol Scand. 2013;92:852-7.
[11] Mergui JL, Polena V, David-Montefiore E, Uzan S. Recommandations pour la surveillance des patientes traitées pour des lésions de haut grade du col utérin. J Gynecol Obstet Biol Reprod (Paris). 2008;37 Suppl 1:S121-30.

 

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